Le 12 juin 2024, la Commission européenne a dévoilé son projet d'augmenter les taxes sur l'importation des véhicules électriques chinois. Cette mesure vise à soutenir l'industrie automobile européenne contre les subventions importantes que la Chine accorde à ses constructeurs de véhicules électriques. Ces subventions, selon Bruxelles, créent un déséquilibre de concurrence et mettent en danger la pérennité des constructeurs européens, encore à la traîne dans la transition vers l'électromobilité.
Contexte et origines de la décision européenne
Compétitivité et subventions : le dilemme européen
Face à un contexte international compétitif, l'Union européenne relève le défi de transformer écologiquement son secteur automobile tout en conservant un avantage compétitif. Cependant, la Chine, en tant que leader du marché mondial des véhicules électriques, bénéficie d'un avantage crucial grâce à d'importantes subventions accordées à ses fabricants nationaux, leur permettant de réduire leurs coûts de production et de proposer des prix plus séduisants.
Considérant cette pratique comme une distorsion de concurrence et une violation des règles du commerce international, Bruxelles a lancé en septembre 2023, suite à une plainte de l'Association européenne des constructeurs automobiles (ACEA), une enquête anti-subvention sur les véhicules électriques chinois. Cette enquête vise à déterminer si les subventions chinoises constituent une concurrence déloyale, préjudiciable aux intérêts de l'Europe.
Le marché des véhicules électriques face à l'influence chinoise
Le secteur des véhicules électriques connaît une expansion rapide, stimulée par la demande des consommateurs, les normes environnementales et les avancées technologiques. L'ACEA estime que les ventes de voitures électriques dans l'UE pourraient s'élever à 3,5 millions d'unités en 2024, représentant 20 % du marché automobile total.
Cependant, la position dominante de la Chine dans le domaine de l'électromobilité représente une menace. En 2023, la Chine a vendu plus de 4 millions de véhicules électriques, occupant ainsi 44 % du marché mondial. Avec plus de 400 constructeurs, dont certains, tels que BYD, Geely ou SAIC, ont déjà pénétré le marché européen, les fabricants chinois offrent des modèles compétitifs. Cette compétitivité est rendue possible par les subventions étatiques et une excellente gestion de la chaîne de production, notamment pour les batteries, qui constituent environ 40 % du coût total d'un véhicule électrique.
Cette prééminence de la Chine génère un déséquilibre commercial significatif entre l'UE et la Chine, comme en témoigne le déficit croissant des Européens. Les importations de voitures électriques chinoises dans l'UE ont bondi de 79 % entre 2019 et 2023, de 53 000 à 95 000 unités. Parallèlement, les exportations européennes de véhicules électriques vers la Chine ont été divisées par deux durant cette période, passant de 92 000 à 46 000 unités.
Impact et détails de la nouvelle taxation sur les véhicules électriques chinois
Des taxes, pour quoi faire ?
Cette nouvelle taxe sur les véhicules électriques chinois vise à assurer une concurrence équitable entre les fabricants européens et chinois tout en soutenant l'évolution écologique de l'industrie automobile de l'UE. Avec un objectif de réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 et d'atteindre la neutralité carbone d'ici 2050, l'UE voit dans le développement des véhicules électriques une étape cruciale. Ces derniers, moins polluants que leurs homologues à combustion, sont essentiels pour atteindre ces ambitions.
Toutefois, grâce à des subventions gouvernementales, les constructeurs chinois de voitures électriques peuvent offrir des prix inférieurs à ceux de leurs concurrents européens, qui font face à des coûts plus élevés en recherche et développement ainsi qu'à des règlementations environnementales plus stringentes. La Commission européenne estime que les subventions chinoises peuvent représenter entre 27 % et 45 % du prix de vente, mettant ainsi en danger la compétitivité et l'emploi au sein des constructeurs européens.
Implications pour les constructeurs chinois et réactions anticipées
Cette taxe influencera significativement les fabricants chinois, les poussant à augmenter leurs prix ou à réduire leurs marges pour maintenir leur présence sur le marché européen. Des entreprises telles que Volvo ont pris les devants en déplaçant leur production de véhicules électriques de Chine vers la Belgique. D'autres, comme BYD, Geely ou SAIC, pourraient éviter les taxes en s'associant avec des partenaires européens ou en établissant des filiales locales.
La Chine, en réponse, a qualifié l'initiative de la Commission européenne de protectionniste, menaçant de contre-mesures et de porter l'affaire devant l'Organisation mondiale du commerce. Elle appelle également à un respect des principes du marché et des règles du commerce international et à une coopération renforcée dans le domaine de l'énergie et du climat.
Les retombées attendues sur le marché européen des véhicules électriques
Le marché européen des véhicules électriques devrait ressentir un impact positif de cette taxation, améliorant la compétitivité et l'innovation parmi les constructeurs européens et stimulant la demande des consommateurs. Avec déjà plus de 60 milliards d'euros investis dans l'électromobilité de 2019 à 2024, les constructeurs européens pourront offrir une gamme de modèles plus performante et variée, renforçant ainsi leur présence sur le marché mondial.
Les consommateurs européens bénéficieront d'un choix plus large et de véhicules électriques de meilleure qualité, mieux adaptés à leurs besoins et plus abordables, grâce à des coûts de production réduits et à une concurrence renforcée. En choisissant ces véhicules, ils participeront également à la réduction des émissions de CO2, contribuant ainsi à la lutte contre le changement climatique.
Conséquences pour les consommateurs et l'industrie automobile européenne
Augmentation des prix pour les consommateurs ?
Une taxe supplémentaire sur les voitures électriques importées de Chine pourrait entraîner une hausse de tarifs pour les acheteurs en Europe. D'après l'Institut Kiel, cette augmentation de la taxation à 20 % se traduirait par un coût supplémentaire de 3,8 milliards de dollars pour la Chine et de 1 500 euros en moyenne pour chaque véhicule électrique chinois vendu en Europe.
Cet accroissement des prix risque de diminuer l'intérêt des consommateurs pour ces véhicules, qui sont pourtant sensibles aux variations de prix, et de limiter la diversité des modèles électriques disponibles sur le marché.
Quelles conséquences pour les flottes automobiles d'entreprise ?
Ces nouvelles taxes risquent de fortement impacter les entreprises qui, pour baisser les coûts, optaient jusqu'à maintenant pour des véhicules électriques de marques asiatiques.
La loi d'orientation des mobilités (LOM) impose en France un verdissement des parcs automobiles et exige que d'ici 2026 au moins 50% des véhicules renouvelés annuellement soient des véhicules à faibles émissions.
Les entreprises ne pourront donc pas reculer devant l'acquisition de véhicules électriques mais devront davantage considérer les véhicules d'origine européenne car les prix des modèles asiatiques ne seront à l'avenir, plus aussi alléchants.
Conclusion
La récente taxation imposée aux véhicules électriques en provenance de Chine vise essentiellement à protéger l'industrie automobile de l'Europe contre les pratiques jugées déloyales de la Chine, notamment ses subventions importantes aux constructeurs locaux. Cette initiative est attendue pour booster compétitivité et innovation parmi les constructeurs européens tout en favorisant la transition écologique du secteur.
Cependant, cette mesure pourrait se révéler à double tranchant. D'une part, les consommateurs européens pourraient se retrouver face à une hausse des prix des voitures électriques chinoises, impactant ainsi leur accessibilité. D'autre part, cette décision pourrait exacerber les tensions commerciales préexistantes entre l'Union Européenne et la Chine.
Ces nouvelles taxes impacteront indéniablement les entreprises qui ont fait le choix des modèles électriques asiatiques dans un soucis économique. Les augmentations tarifaires à prévoir changeront la donne et inciteront très certainement les entreprises à opter pour des modèles européens.